Avec Aquae Veritas, Jean-Sébastien Touchet explore la nature imprévisible de l’accident, là où l’inattendu révèle des vérités profondes sur le vivant. Dans cette série, l’eau, la lumière et l’air deviennent des acteurs autonomes, leurs interactions fortuites formant des compositions à la fois éphémères et saisissantes.
En détournant l’instant photographique de sa fonction descriptive, Touchet capte non pas l’image de la matière, mais sa vibration. Aquae Veritas transcende la simple captation pour devenir une réflexion poétique sur l’imprévisibilité comme force créatrice.
L’accident comme révélateur de beauté
Loin d’être un désordre, l’accident est ici sublimé, transformé en un événement esthétique. Chaque œuvre capture des instants où les forces naturelles – reflets changeants, ondulations de l’eau, jeux de lumière – agissent de manière imprévisible mais harmonieuse.
L’eau, élément central, ne se limite pas à son rôle de surface réfléchissante. Elle devient une substance vivante, en perpétuelle transformation. Par son traitement épuré, Jean-Sébastien Touchet révèle cette matière dans sa capacité à refléter, absorber, et diffuser la lumière, créant une tension visuelle entre mouvement et immobilité, chaos et structure.
Ces œuvres invitent à une contemplation prolongée : le spectateur est confronté à l’ambiguïté du visible, entre abstraction et figuration. L’accident, loin de perturber, agit comme un révélateur de l’essence du vivant, de sa beauté fragile et insaisissable.
La matière du vivant : vibration et impermanence
Aquae Veritas capte l’essence de la matière dans son état le plus fluide, presque intangible. Les nuances diffuses, les transitions lumineuses, et les textures subtiles interrogent notre capacité à percevoir et interpréter ce qui échappe à une observation rapide. Ces œuvres ne montrent pas la nature telle qu’elle est, mais telle qu’elle se transforme, dans un dialogue constant avec l’imprévu.
En sublimant cette impermanence, Touchet invite à repenser notre lien au vivant. Chaque œuvre devient une méditation sur le temps et sur l’instabilité inhérente aux éléments. L’eau, souvent perçue comme un symbole de transparence ou de calme, se dévoile ici dans sa complexité : fluide, imprévisible, et profondément vivante.
Une expérience sensorielle et contemplative
Présentées dans un espace immersif, les œuvres de Aquae Veritas amplifient leur impact par leur mise en scène. Suspendues ou flottantes, elles semblent en dialogue direct avec leur environnement. Cette présentation minimaliste laisse la place à l’interprétation, invitant le spectateur à ralentir et à se laisser absorber par les textures et les vibrations subtiles.
Chaque tableau agit comme un portail, ouvrant une réflexion personnelle sur notre perception du monde naturel. Ce choix de mise en scène renforce l’idée que l’imprévu – cet accident sublime – n’est pas une simple déviation, mais une clé pour mieux comprendre l’essence du vivant.
Révéler l’imprévisible
Avec Aquae Veritas, Jean-Sébastien Touchet nous offre une série où la matière devient langage, où l’accident devient intention. Ces œuvres ne cherchent pas à capturer, mais à révéler : elles dévoilent une beauté inhérente à l’imprévisible, cette part insaisissable qui sous-tend la vie.
En sublimant l’impermanence et le hasard, Touchet nous invite à regarder autrement, à percevoir dans l’éphémère une vérité universelle. Aquae Veritas n’est pas une simple série d’œuvres : c’est une expérience contemplative, une exploration de la manière dont le vivant se manifeste dans son imprévisibilité la plus pure.
— Pascale Chatillon